Salut,

Plus qu’un mois avant la fin de mon congé sabbatique. Qu’est-ce que j’ai appris jusqu’ici ? J’avoue que cette question m’a paralysée pendant un moment. Mon voyage a été si important pour moi que répondre de manière catégorique me semble trop réducteur. Mais si je dois répondre, je crois que j’ai appris à m’aimer un peu plus, à avoir davantage confiance en moi et à faire preuve de patience. Évidemment, je suis au cœur d’un processus, et la patience en est la clé. J’espère, une fois de retour en Suisse, être capable de continuer à progresser sur ce chemin et de partager un peu de cet amour avec le monde.

Mon cerveau commence gentiment à se projeter vers mon retour en Suisse. C’est très intéressant de l’observer : il identifie les aspects les moins réjouissants et les intensifie, sans doute pour éviter le mal du pays une fois que j’y serai. Maintenant, ma maison me manque, mon lit me manque, prendre le métro ou le bus commence à me lasser.

Ce mécanisme vient de ma grande capacité d’adaptation. Depuis toute petite, j’ai dû, inconsciemment, m’adapter à diverses situations, soit pour me protéger et avancer dans la vie, soit pour protéger les autres. C’est littéralement un mécanisme de défense de mon cerveau reptilien : la survie. Si vous me connaissez un peu, vous avez déjà remarqué que je suis toujours en mouvement. Cela peut paraître très intéressant, mais je sais que ça vient de ma quête constante de nouveauté et d’adrénaline. Est-ce que ça me fatigue ? Oui, beaucoup, mais cela me permet d’oser et de découvrir le monde. Mon défi est de comprendre mon propre fonctionnement pour trouver un équilibre sans me perdre. Ce n’est pas une tâche facile dans un monde qui nous laisse peu d’espace pour explorer nos mécanismes et nos pensées, qu’elles soient conscientes ou subconscientes. De simplement réaliser que l’on porte parfois des visions qui ne nous appartiennent pas, mais auxquelles on adhère par sympathie ou par conditionnement.

Voilà… Je suis contente à l’idée de retrouver ma maison, mes affaires, mes ami·e·s. Pour l’instant, ici, j’ai du travail, mais un travail non rémunéré. Triste réalité ! Encore une chose qui me manque : mon salaire ! Haha.

Et ici, que se passe-t-il ? Mercredi dernier, je suis allée à l’Open Mic organisé par mon professeur Phil Ramocon, un ami de Gregg (je vous ai parlé de Gregg la semaine passée). Nous avions prévu de chanter deux chansons : « War » de Bob Marley et « Menina Bela », ma propre composition.

Je n’ai pas aimé ma performance ce soir-là. J’ai oublié une partie des paroles, et pourtant, j’avais tellement envie de livrer une prestation incroyable. Je suis rentrée à la maison, triste, en me posant une multitude de questions : Qu’est-ce que je veux vraiment ? Faire carrière ? Être mondialement connue ? Est-ce que tous ces efforts en valent la peine ? Pour qui ? Pourquoi ? Comment ?

Ce soir-là, je suis rentrée vers 2h00 du matin. J’ai marché pendant une heure, sans direction, pour essayer de me vider la tête. J’ai fait la rencontre de la solitude de l’artiste, ce moment où l’on se sent seul au monde, où l’on est face à soi-même. Il était minuit, les rues étaient vides, je n’avais pas peur. Tout à coup, j’ai vu un renard. Ici, on en voit facilement la nuit. Il était tellement beau ! Il était tellement beau ! Son pelage roux, sa taille d’environ 40 cm avec la queue, ses longues oreilles triangulaires et ses yeux vifs m’ont captivée. Il m’a fait penser au renard du Petit Prince de Saint-Exupéry. Saviez-vous que les renards sont connus pour leur grande capacité d’adaptation ? Quelle coïncidence ! Au Brésil, j’ai grandi dans un quartier populaire de la banlieue de Rio de Janeiro. Là-bas, on ne voit que des chiens errants ou des voleurs prêts à nous dépouiller (j’exagère à peine). Ce soir-là, j’étais triste, et la vie m’a offert une rencontre spéciale qui m’a rappelé qu’elle est belle.

Le samedi 20 septembre, je pars une semaine au Portugal. Je veux profiter un peu de la fin de l’été et passer du temps avec ma famille. Je vais aussi chanter avec Gregg le 26 septembre pour le festival de poésie de Lisbonne. Nous avons préparé un répertoire sublime pour l’occasion. Le défi, maintenant, est de travailler ce répertoire qui va de Tom Jobim à Billie Holiday.

Je vois Gregg tous les jours depuis lundi. Il a une manière de travailler très différente de ce que j’ai connu jusqu’ici. Avec Raphaël, mon ami et guitariste en Suisse, les répétitions sont des moments de travail mais aussi d’amusement, où les erreurs ont leur place. Avec Gregg, le niveau d’exigence est différent, je dirais même plus rigide. C’est une autre façon de travailler. Je ne sais pas si je suis à l’aise avec cette méthode, mais j’ai le sentiment d’être au bon endroit pour apprendre de nouvelles choses et passer à un autre niveau.

À l’école de musique, nous sommes toujours concentrés sur la performance du samedi 20 septembre. D’ailleurs, j’ai mon évaluation le matin même, et l’après-midi, j’ai mon vol pour le Portugal. Pour moi, l’école prend moins de place en ce moment ; je suis plus focalisée sur le concert du 26 septembre, l’enregistrement avec Max la semaine prochaine et les concerts à venir en Suisse. J’ai un nouveau projet là-bas qui s’appelle SOLAR. Nous avons déjà deux concerts prévus d’ici la fin de l’année, et l’idée est d’organiser le calendrier des répétitions. Un travail dont je suis responsable. Vous allez adorer!

Voilà pour cette semaine. J’en profite pour remercier toutes les personnes qui ont participé à la cagnotte et qui ont répondu à mon mail avec leurs adresses postales. Je vous enverrai les cartes postales cette semaine.

Avec amour,

Camila